Les 259 pages du rapport étant un peu indigestes, nous vous proposons un résumé mettant en lumière les raisons qui font qu'au final c'est le consommateur qui paye (comme souvent…).
Rappelons tout d'abord que même lorsque cela n'est pas mentionné, comme cela est le cas pour l'E85 ou le SP 95E10, tous les carburants distribués en France incorporent une partie de biocarburant, y compris le diesel.
Le but au départ était de créer de nouveaux débouchés pour la filière agricole, seul objectif atteint d'ailleurs selon la Cours de Comptes. Mais à partir de 2005, la France a décidé d'imposer un taux d'incorporation de biocarburant dans les carburants fossiles plus ambitieux que celui demandé par la commission européenne. Il devait atteindre 7 % en 2010, ce qui équivaut en volume à 7,6 % pour le diesel et 10,3 % pour l'essence. Et même ensuite 10 % en 2013.
Le consommateur paye son plein de super 2,40 € plus cher lorsqu'il contient de l'E10, selon la Cour des Comptes
Dans le même temps, afin d'encourager les pétroliers à atteindre ces objectifs, et les sanctionner dans le cas contraire, l'État a créé la TGAP (Taxe générale sur les activités polluantes). Or les contraintes de qualité de carburant actuelle rendent l'objectif d'incorporation irréalisable ! En effet, à moins de négliger les normes de qualité du carburant, ou de développer des moteurs adaptés (pour le B30 en diesel et pour l'E85 en essence), ce qui n'a pas été le cas, impossible d'incorporer plus de 7 % en volume de biodiesel et 10 % en volume de bioéthanol.
Les pétroliers sont donc contraints de payer systématiquement, depuis 2009, la TGAP ! Et cette taxe, qui a rapporté à l'état plus de 525 millions d'euros entre 2005 et 2010, est bien évidemment reportée sur les prix à la pompe, et donc supportée par le consommateur final que nous sommes, affirme déjà la Cour des Comptes.
Ensuite, autre phénomène, le pouvoir calorifique inférieur des biocarburants. Le rapport avance les chiffres suivant : l'éthanol a un pouvoir calorifique inférieur de 34 % à l'essence, et le biodiesel reste 8,5 % moins calorifique que le diesel. Résultat, mais ce n'est pas une nouveauté, on le sait depuis longtemps, on consomme plus de biocarburant pour parcourir une même distance. Donc plus on en incorpore dans le carburant fossile, plus on surconsomme. La suite est implacablement logique : moins de kilomètres avec un plein = des pleins plus fréquents = une augmentation du budget carburant pour l'automobiliste.
Enfin, à la marge, le coût de fabrication des biocarburants (pourtant soutenus fiscalement) est plus élevé que celui des carburants fossiles : + 4 % pour le biodiesel et + 1 % pour l'E10.
Les estimations de la Cours des comptes en tenant compte de ces trois éléments (TGAP, surconsommation, et coûts de production plus élevés) donnent un résultat détonnant. Les automobilistes dépensent en moyenne 2,40 € de plus sur un plein de 50 litres d'essence contenant de l'E10 et 60 centimes de plus sur un plein de diesel contenant du biodiesel. Sur la période 2005-2010, le consommateur automobiliste aurait globalement supporté la somme colossale de 3 milliards d'euros !
La Cour souligne par ailleurs que les bénéfices en terme d'environnement sont flous et difficiles à évaluer (moins de CO2 à l'échappement mais du CO2 à la production). Elle préconise donc une réduction de la TGAP pour limiter la hausse des prix à la pompe, et une réduction de l'aide à la filière, mais aussi des objectifs d'incorporation plus réalistes pour les pétroliers et les constructeurs.
On le devine donc : pour le moment, les biocarburants ont surtout coûté cher et leur bénéfice est controversé. Affaire à suivre.
N.B. : suite à une remarque de La collective du bioéthanol, sur laquelle nous sommes d'accord, il faut alerter sur le risque d'amalgame. Les biocarburants ne sont pas la cause de l'augmentation actuelle régulière du prix des carburants. Cause qui est ailleurs (augmentation du prix du baril, baisse de l'euro face au dollars, etc.). Mais la Cour des Comptes fait remarquer que la politique même d'aide à la filière des biocarburants a conduit mécaniquement à un renchérissement du prix global des carburants, et une augmentation du budget carburant de l'automobiliste, sans contrepartie environnementale globale clairement avérée.
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