En bref
2,0 l i-VTEC Turbo
310 ch et 400 Nm
À partir de 35 000 €
Type R - R comme Racing - désigne les plus extrêmes des modèles de série de Honda depuis le début des années 90, mais le constructeur japonais a tendance à oublier de temps en temps le marché européen. Ainsi, en 1992, la première du nom, la NSX-R NA1, ne verra jamais officiellement le Vieux Continent ni même ne quittera l'archipel nippon, tout comme la première Civic Type R EK9 en 1997, l'Integra Type R DC5 en 2001 ou la NSX-R NA2 en 2002. Parfois aussi il faut prendre son mal en patience, comme pour la première Integra Type R, la DC2, sortie en 1995 au Japon mais qui ne sera commercialisée chez nous qu'en 1998, et dont j'aurai d'ailleurs la chance d'être un propriétaire comblé.
Mais cette fois, c'est le monde entier qui a dû ronger son frein pendant trois longues années après la naissance de la neuvième génération de Civic en 2012. Avec une énorme surprise à la clé. La FK2, puisque c'est son petit nom, présente en effet une particularité, une sorte de protubérance sur son collecteur d'échappement appelé plus communément un turbo. Coup de tonnerre dans la communauté tatouée d'un H sur le biceps, composée avant tout de puristes drogués de tr/min et volontiers moqueurs des mécaniques nécessitant une telle assistance respiratoire. Est-ce la fin d'un mythe ? Est-ce un signe avant-coureur d'apocalypse ? Mais surtout, est-ce que Honda avait vraiment le choix ?
Pourquoi ne pas rester à l'atmosphérique ? Parce qu'il existe des normes, de pollution comme de bruit, des standards de fiabilité mais aussi des limites physiques. Désormais la norme parmi les compactes sportives se trouve à près de 300 ch, une puissance inenvisageable pour un quatre cylindres sans suralimentation dans un modèle de série, et le turbo était par conséquent la seule solution pour aller taquiner les références que sont la Renault Mégane RS Trophy et la Seat Leon Cupra. Mais heureusement, les progrès de la technologie permettent aujourd'hui d'avoir le beurre et l'argent du beurre.
Sous le capot se trouve donc un bloc annoncé comme entièrement nouveau, baptisé K20C1 et faisant donc toujours partie de la famille des K, et la lecture attentive de la fiche technique montre déjà une manière de faire différente : c'est un moteur supercarré, avec un alésage de 86 mm contre 85,9 mm pour la course, quand les moteurs suralimentés sont plus souvent à course longue ; le taux de compression est élevé, à 9,8 : 1, encore une fois peu commun en présence d'un turbo, et ce dernier est à simple étage et de taille réduite. Il faut donc monter jusqu'à 6 500 tr/min pour atteindre 310 ch avec encore 500 tr/min supplémentaires avant d'atteindre la zone rouge. Cela annonce une allonge supérieure aux autres moteurs suralimentés qui atteignent leur puissance maximum 1 000 tr/min plus tôt, sans cependant égaliser les régimes stratosphériques des Type R d'antan perchées à 8 000 tr/min.
Mais ça n'est pas tout. Combiné avec l'injection directe et les systèmes de décalage des arbres à came (VTEC) et de l'ouverture des soupapes (Dual VTEC), cette Civic est gratifiée d'une spécificité à laquelle aucune Type R n'a eu droit jusque-là : du couple. Et pas qu'un peu, puisque les 400 Nm fournis de 2 500 à 4 500 tr/min font jeu égal avec ce qu'offrait le 5 cylindres 2,5 l de la Ford Focus RS de seconde génération. Pour l'anecdote, son aînée n'avait que 193 Nm à sa disposition, qu'il fallait de plus chercher à 5 600 tr/min. Pour la seconde anecdote, la consommation mixte annoncée est de 7,3 l/100 km, pour des émissions de CO2 de 170 g/km et donc 2 200 € de malus.
Pour aller avec ce feu d'artifice mécanique, il fallait aussi une boîte de vitesses mécanique digne de ce nom, domaine dans lequel Honda fait partie des références et n'avait donc pas droit à l'erreur. Chacun des six rapports a été ainsi soigneusement optimisé pour garantir avant tout les meilleures performances, comme le prouve une vitesse de pointe atteinte précisément au régime de puissance maximale en sixième. De plus, les sensations tenaient une place centrale dans le cahier des charges, avec une course de changement de vitesse de seulement 40 mm et une grande rigidité de chacun de ses composants pour garantir une précision totale. La boîte héberge aussi un différentiel à glissement limité mécanique de type hélicoïdal qui se charge de contribuer à ce que chacun des chevaux soit transmis au goudron même dans les courbes les plus serrées.
Mais ce dernier n'est pas le seul à contribuer à la motricité, puisque le train avant en porte une bonne part de responsabilité. Il fait appel à une géométrie baptisée Dual Axis Strut qui n'est pas sans rappeler le RevoKnuckle de la Ford Focus RS Mk2 ou de ce qu'on trouve sur la Renault Mégane RS, avec des pivots découplés pour séparer la jambe de force et la commande de direction, ce qui permettrait selon Honda de réduire de 55 % les remontées de couple. À l'arrière, pas de multibras mais une barre de torsion en H plus rigide permet de se passer de barre antiroulis. Enfin, la Type R bénéficie de suspensions pilotées, ce qui promet une polyvalence à laquelle ne pouvaient pas prétendre les modèles précédents.
Vient enfin le dernier maillon de la chaîne de transmission : les roues. Les jantes en 19 pouces sont équipées de pneus en 235/35R19, des Sport Contact 6 spécialement développés par Continental. Elles cachent difficilement un système de freinage concocté par Brembo, avec des étriers quatre pistons et des disques ventilés perforés de 350 mm à l'avant, qui ont la lourde charge de ralentir les 1 382 à 1 397 kg de l'ensemble suivant le niveau de finition, une valeur qui reste tout à fait raisonnable. Avec un tel rapport poids/puissance, le 0 à 100 km/h est annoncé en 5,7 s, ce qui est un record pour une traction.
À l’intérieur, on retrouve cette planche de bord futuriste sur deux niveaux avec cependant une touche de sport supplémentaire apportée par les magnifiques sièges baquets, le pommeau de vitesses, le pédalier en aluminium ainsi que les accents de rouge, que ce soit au niveau des inserts ou des surpiqûres. L'affichage i-MID comprend un écran spécifique avec accéléromètre, pression de freins et position de l'accélérateur, pression de suralimentation, température d'eau, pression et température d'huile, et un chronomètre. Au-dessus du tachymètre, une rangée de LEDs colorées s'allument tour à tour pour informer le conducteur de la proximité du régime maximal. Pas d'assise relevable Magic Seat à l'arrière où seules deux personnes peuvent prendre place désormais, mais la banquette reste rabattable, les portes arrière s'ouvrent toujours à 90° pour favoriser l'accès à bord et le volume de coffre de 498 litres continue de faire partie des meilleurs du marché.
Passons enfin au sujet épineux de l'esthétique. La Civic de base ne fait déjà pas dans la dentelle mais la Type R devient franchement méchante. Oui, c'est chargé, torturé, voire vulgaire telles qu'on pu être avant d'autres sportives japonaises comme la Subaru Impreza ou la Mitsubishi Lancer. Mais rien n'est là par hasard. Honda a en effet fait correctement ses devoirs en associant modélisation sur ordinateur, soufflerie à Sakura, au Japon, normalement consacrée au département Formule 1 et validation finale sur le circuit de Suzuka, sur la Nordschleife en Allemagne et au centre d'essai de Takasu. Ainsi le pare-chocs avant a été redessiné pour réduire les turbulences autour des roues avant, les grilles sont élargies pour garantir le refroidissement de la mécanique, le colossal aileron fixe améliore l'appui avec une traînée minimale autorisant une vitesse maximale de 270 km/h et l'authentique diffuseur, flanqué de deux doubles sorties d'échappement et dans le prolongement du fond plat, génère une portance négative qui colle la voiture à la route. Agressive et peu discrète, certes, mais la forme sert donc ici la fonction.
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