Toyota : ambitions refoulées
Dévoilée au salon de Tokyo en 1965, le superbe coupé 2000 GT sera d'abord le fer de lance de Toyota en compétition. Si la GT avec son 6 cylindres porté de 150 à 170 ch se joue facilement des Nissan Fairlady dans les épreuves d'endurance, elle avoue rapidement ses limites face aux prototypes Prince R 380, notamment dans les éditions 1966 et 67 des GP du Japon. Une situation intolérable pour le premier constructeur nippon. Un programme prototype est alors mis à l'étude au printemps suivant en collaboration avec Yamaha, l'un des nombreux satellites de l'empire Toyota. Conçu et réalisé dans l'usine Yamaha de Hamamatsu, le moteur V8 à 90° dérive du bloc en alliage léger de la berline Century. D'une cylindrée de 2981 cm3, il est doté d'une culasse à quatre ACT et d'une injection Denso (une licence Bosch) et développe d'emblée une puissance de 330 ch . Un chiffre qui peut paraître modeste aujourd'hui mais qui, à titre de comparaison, est très voisin de celui du flat 8 des premières Porsche 908 construites à la même époque. Développé plus rapidement que le V8, le châssis semi-monocoque en alliage léger, habillé d'une jolie carrosserie de barquette rappelant un peu les lignes du spider Dino 206 Ferrari, entame ses premiers essais de roulement au printemps 1968 avec d'abord le 6 cylindres de la 2000 GT. Le montage du V8 avec ses gros échappements et le surcroît de puissance impliqueront rapidement de nombreuses retouches de carrosserie. Le capot arrière sera tronqué à la verticale des roues arrière, les ouies de refroidissement élargies sur les flancs tandis que des bavettes avant et un large aileron arrière viendront se greffer au fil des courses. Autant de modifications, qui conjuguées avec l'emploi de pneus plus gros abrités sous des passages d'ailes élargis, donneront à la voiture une silhouette tourmentée et très agressive. Surclassées par les nouvelles barquettes Nissan à moteur Chevrolet au GP du Japon 1968, les trois Toyota 7 engagées (la première ne terminera que 8e) sont de plus confrontées à de sérieux problèmes de fiabilité. Renforcées notamment au niveau des suspensions et du châssis, les barquettes se montrent à leur avantage en fin de saison en s'imposant dans les trois grandes épreuves d'endurance, face aux Nissan mais aussi devant de bonnes Lola T 70 alignées par le puissant Taki Racing Team. En décembre 1968, les 4e/5e et 6e places obtenues derrière les McLaren M6B de Revson et Bonnier et la Lola T160 de Posey, venus disputer les 200 miles de Fuji furent alors considérées comme de sérieux gages pour l'avenir. Après une dernière victoire au printemps 1969 à Suzuka, la Toyota 7 achève sa courte carrière. Le temps est venu de préparer la "New 7".
Un tout nouveau V8 à 90° d'une cylindrée de 4968 cm3 est rapidement développé. Peu encombrant, léger, doté d'une culasse à quatre soupapes par cylindre, il délivre une puissance de 530 ch. Installé d'abord dans un prototype à carrosserie fermée, efficace sur le plan aérodynamique mais bien trop lourd, il trouve bientôt sa place dans une barquette à châssis multi-tubulaire. Dévoilée le 27 juillet 1969, lors des 1000 km de Fuji, cette dernière se distingue par sa carrosserie anguleuse et très compacte. Le museau effilé, percé simplement de deux petites prises d'air et orné simplement de deux petites bavettes conjugue appui et qualités aérodynamiques, tandis que la poupe tronquée et flanquée d'un large volet, abrite les radiateurs d'huile et eau disposés derrière chacune des roues arrière. Une première sortie couronnée par une victoire, suivie bientôt par un nouveau succès dans 1" "Net Speed Cup" en août. C'est donc en toute confiance que Toyota aborde le GP du Japon le 10 octobre suivant, d'autant que l'équipe s'est adjoint les précieuses compétences de Vic Elford pour le développement de ses machines. Pourtant forte de cinq voitures, l'escadre Toyota subira la loi des nouvelles Nissan R 382 animées par un moteur V12 porté pour l'occasion à 6 litres. Rapides mais débordées en puissance pures, trois Toyota "New 7" parviennent néanmoins à réaliser un joli tir groupé en prenant les 3e/4e et 5e places. A l'occasion des 200 Miles de Fuji, en novembre suivant, Toyota aligne deux modèles différents : une "New 7" allégée de 30 kg (720 kg) et dotée d'une carrosserie qui n'enveloppe plus les roues arrière, ainsi qu'une McLaren M12 animée elle aussi par le V8 "maison" délivrant désormais plus de 600 ch. Enfin, les deux voitures se distinguent par le montage d'un grand aileron arrière, type Chaparral, l'épreuve de Fuji se disputant sous l'égide du "Japan Automobile Federation" et non de la FIA. Minoru Kawai (le meilleur pilote japonais selon le témoignage de Vic Elford) s `imposait au volant de la barquette 100 % japonaise, devant la Ford G7A de John Cannon et la McLaren M12 de Motschenbacher, deux bons spécialistes de la Canam. Un succès probant face à des machines à moteur 7 litres, mais relatif sur le plan du prestige pur, car Nissan, le grand rival, était absent. Une saison en demi teinte, donc, pour Toyota, qui avait encore dû, non seulement subir la loi des Nissan au GP du Japon, mais aussi un arrière goût d'amertume de s'être laissé berner par l'escalade hypocrite de son concurrent. Bien décidé à prendre un net avantage sur Nissan, Toyota se lance alors dans un programme très ambitieux. Pendant l'hiver 1969, un nouveau prototype "New 7" aux lignes agressives et surbaissées est mis en chantier. Très moderne dans son allure, mais toujours dotée d'un châssis multitubulaire, la barquette est propulsée par une nouvelle variante du V8. Suralimenté par deux turbocompresseurs et développant 800 ch, ce moteur devait éclipser le V12 Nissan. La confrontation n'aura hélas jamais lieu. L'arme absolue de Toyota sera complètement détruite en cours d'essai et Minoru Kawai, tué sur le coup. Comme, dans le même temps, Nissan avait renoncé à disputer le GP du Japon, Toyota décida à son tour de se retirer de la compétition et le JAF ouvrit alors son épreuve aux monoplaces de F2. Lors de l'édition 1970 (enlevée pour la petite histoire par Jackie Stewart sur une Brabham BT 30), la Toyota Turbo reconstruite fut alors dévoilée au grand public avant de rejoindre le musée du constructeur, dont elle sort quelques fois à l'occasion de grands meetings historiques...
Palmarès
Toyota 7 (3 litres)
1968 : ler 1000 km Fuji (H. Fushida - M. Kanie) ; ler 12 heures Suzuka (S. Hosoya - Y. Otsubo) ; ler 1000 km Suzuka (H. Fushida - S. Fukuzawa)
1969 : ter 500 km Suzuka (M. Kawai) ;
Toyota "New 7" (5 litres)
1969 : ter 1000 km Fuji (H. Fushida - Y. Otsubo) ; ler "Net Speed Cup race" ; ter 200 Miles Fuji (M. Kawai)
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