Comme je m’y attendais, le V8 de 605 chevaux se réveille dans un fracas qui me fait frémir. Il fait très froid aujourd’hui, la route est verglacée, je parcours donc plusieurs kilomètres pour chauffer l’auto à un rythme de croisière, plutôt tranquille. Pas question de monter dans les tours sans préliminaires. Le toit fermé, je ne perçois aucune différence avec la 458 Speciale. On retrouve les mêmes sensations : les suspensions sont très fermes et le V8 plein d’impertinence manque légèrement de souplesse. On peut tout de même rouler dans un confort respectable grâce à la transmission à double embrayage qui enchaîne en douceur les rapports. On enclenche rapidement le septième aux environs de 80 km/h. Une vitesse que l’on peut atteindre en condition sportive en tirant bien fort sur le premier rapport…
Alors que la nature s’éveille et que quelques rayons de soleil viennent réchauffer la route, je me décide à tomber le toit et à passer en mode sport. Et là, c’est la révélation. Avec 605 chevaux pour 1 340 kg (plus le conducteur), je m’attendais à des accélérations sensationnelles. Je n’ai pas été déçu. A peine enfoncez-vous la pédale de droite que le décor se met à défiler en accéléré. Quand on lit la fiche technique : 0 à 100 km/h en 3 secondes, 0 à 200 en 9,5 secondes, une vitesse maximale de 325 km/h, on se dit « OK c’est ultra-performant ça doit être génial», mais on ne réalise pas vraiment ce que cela peut donner. Derrière le volant on découvre un monde redéfini. Vous vous souvenez d’une scène de film dans laquelle le superhéros découvre ses pouvoirs ? C’est la même chose ici. On a l’impression que le monde est à l’arrêt, que l’on n’appartient plus au monde réel, que l’on a des superpouvoirs.
En vérité, c’est l’auto qui en a car le cerveau a quand même un peu de mal à encaisser les informations à partir d’une certaine vitesse. Heureusement nous disposons d’une route fermée à la circulation. Impossible sinon de faire un essai correct de ce monstre car c’est à partir de 5 000 tr/mn qu’il révèle toute sa personnalité et se démarque nettement de la 458 Italia. Et les sensations dans tout ça ? Elles sont au rendez-vous, et bien plus nombreuses que ce que je l’avais imaginé ! Je n’ai pas souvenir d’avoir eu autant de plaisir au volant d’un cabriolet depuis la F50. L’Aperta est une machine à frissons. Toutes les émotions sont décuplées et le hurlement de son V8 est clairement intimidant… au tout début. On prend vite le goût de jouer avec lui au travers des palettes de la boite séquentielle robotisée à double embrayage laquelle tout simplement parfaite, équilibre idéalement efficacité et lascivité. Cette dernière donnée malheureusement trop souvent oubliée sur les sportives actuelles qui misent tout sur les performances.
En utilisation sportive, les passages de rapports sont moins lissés que sur la 458 Italia (je ne vous parle même pas de la McLaren 650S) et offrent de beaux petits à-coups au rétrogradage. Ni trop doux, ni trop violents, juste ce qu’il faut pour que l’on prenne un plaisir fou à s’amuser avec. La sonorité du moteur achève l’enchantement et se révèle moins artificielle que sur la Speciale coupé. Pure, précieuse, violente, elle envoûte, rend accro. Je vous laisse juger par vous-mêmes avec la vidéo de cet essai.
S’il fallait trouver des défauts au niveau de l’auto, ce ne serait pas au niveau des freins carbone-céramique qui jouent leur rôle à la perfection. Il en va de même du comportement de l’auto. Grâce à son système d’aérodynamique actif dans les boucliers avant et arrière, les flaps sur les bas de caisse et ce fameux capot creusé qui guide les flux d’air, il est très difficile de la mettre en défaut (sauf si l’on débranche toutes les aides électroniques mais honnêtement sur du verglas ce n’est pas quelque chose qui m’a traversé l’esprit). Il est toutefois possible de s’offrir quelques belles glissades grâce au système Slide Slip Control (SSC). Ce système intelligent compare en permanence l’angle de la dérive de l’auto avec la trajectoire idéale. Si la dérive est trop importante il fait agir l’anti-patinage et bloque le différentiel électronique. Pour ceux d’entre vous qui sont hermétiques à la technique, il s’agit tout simplement d’un système qui vous permet de faire des glissades en toute sécurité tout en vous faisant croire que vous êtes fin pilote. Le drift pour les nuls en somme.
Non vraiment le seul bémol que je trouve à cette 458 Speciale A c’est sa direction, trop souple, trop floue, comme sur bien des sportives actuelles. C’est dommage car le train avant et le châssis sont tout simplement fabuleux. Ce dernier ne souffre pas d’un défaut de rigidité due à la perte du toit. Il est d’une précision et d’une efficacité hors norme, mais reste tout de même un léger cran en dessous de celui de la McLaren 650S. Mais bon c’est comme être vice-champion du monde : on reste dans l’élite et à moins d’être pilote, il y a peu de chance que cela fasse une différence concrète pour vous.
En dehors de ces qualités techniques et de ses performances exceptionnelles, la 458 Speciale A réussit là où ses concurrences pêchent : au niveau des sensations, du plaisir de conduite. Elle est clairement la supercar la plus jouissive que j’ai eu le plaisir de conduire depuis très très longtemps. Depuis la 16M en fait, qui était à la F430 ce que l’Aperta est à la 458.
On sent que les ingénieurs de Ferrari ont donné le meilleur d’eux-mêmes pour concevoir cette auto qui outre sa production en série limitée, s’annonce d’ores et déjà comme un modèle important dans l’histoire de la marque car il est fort probable qu’il s’agisse du tout dernier modèle doté d’un V8 atmosphérique.
En effet la prochaine déclinaison de la 458, qui pourrait être présentée au Salon de Genève en mars prochain serait dotée d’un V8 biturbo.
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