Au CES de Las Vegas 2025, la voiture n'est plus qu'un support de son logiciel
En direct du CES de Las Vegas 2025. Des constructeurs automobiles de tous les continents jusqu’aux équipementiers, ils n’ont plus que ces trois lettres à la bouche : « SDV », désignant les « véhicules définis par le logiciel ». Avant on rêvait d’une voiture pour la noblesse de son moteur ou l’élégance de ses lignes, maintenant ces machines doivent briller davantage par leurs fonctions servicielles. Ah, quelle époque…
Il y a encore dix ans, les constructeurs américains comme les marques étrangères venaient systématiquement aux salons de Los Angeles ou de Detroit avec de rutilantes nouveautés et des concept-cars extravagants. En ce temps-là, on rêvait encore de beaux moteurs thermiques et de magnifiques voitures, dans lesquelles commençaient d’ailleurs à se répandre les capacités de connectivité smartphone d’Apple et de Google.
Aujourd’hui, certains de ces salons historiques tendent à disparaître et le grand public ne semble même plus concevoir une voiture moderne sans de grands écrans tactiles à bord. Le contenu électronique des autos devient un sujet tellement important qu’il représente désormais l’élément principal dans le développement des automobiles actuelles, loin devant son « caractère » mécanique ou esthétique. D’ailleurs, il ne reste plus vraiment de place pour les gros moteurs thermiques, désormais cantonnés à des catégories de sportives ultra-élitistes, alors que la voiture de monsieur tout le monde doit embarquer un groupe motopropulseur électrique ou au moins hybride.
Depuis quelques années, un nouveau terme se retrouve dans tous les communiqués officiels des marques et sur la bouche de leurs dirigeants en conférence de presse : « SDV » pour « Software Defined Vehicle », ou « véhicule conçu par le logiciel » en Français. Un terme générique qui désigne cette nouvelle façon de concevoir les voitures dans laquelle ses capacités logicielles fusionnent avec ses matériaux physiques et deviennent même l’élément principal. Si vous êtes un « puriste », vous connaissez sans doute avant tout une BMW pour ses six cylindres en ligne au tempérament bien trempé ou son comportement dynamique sportif mais au CES de Las Vegas 2025, la marque à l’hélice célèbre plutôt sa nouvelle interface électronique de bord. Certes, elle communiquait déjà de cette façon en 2001 lors du lancement de son tout premier système i-Drive mais à l’époque, ce genre de technologie se concevait plutôt comme des accessoires du reste.
Au CES de Las Vegas au contraire, la connectivité, les capacités servicielles et les aptitudes de conduite autonome promises par le SDV prennent toute la place. Même des marques comme Honda, un constructeur automobile pas spécialement connu pour la qualité de ses systèmes embarqués jusqu’à présent, y dévoilent de toutes nouvelles générations de voitures dont la plateforme logicielle conçue en interne doit constituer le point fort. Outre ses show-cars au design spectaculaire, la marque annonce par ailleurs une collaboration avec le spécialiste des puces Renesas et le géant de l’informatique IBM avec des applications en série attendues avant la fin de la décennie actuelle. Elle investit aussi dans l’intelligence artificielle via la société américaine Helm.ai, ces technologies étant étroitement liées elles aussi au concept du SDV.
Chez les équipementiers comme Valeo, Bosch ou Continental tous présents au CES 2025, le développement de systèmes autour de la technologie des SDV figure aussi au centre des préoccupations et des éléments de langage.
En ces temps de crise du marché automobile, l’élaboration de plateformes logicielles complètes représente tout simplement une question de survie pour la filière : « Valeo présente trois nouvelles solutions en collaboration avec AWS pour accélérer le développement des unités de contrôle électronique jusqu'à 40 % (Valeo Virtualized Hardware Lab), permettre le développement de logiciels intégralement sur le cloud et la validation de workflows pour la mobilité autonome (Valeo Cloud Hardware Lab), et améliorer la sécurité et l'expérience de conduite (Assist XR) », lit-on par exemple dans le dernier communiqué de la société française qui comprend un nombre impressionnant d’anglicismes et de mots à « forte valeur » actuellement pour les investisseurs.
De Renault à Volkswagen en passant par Hyundai-Kia, Stellantis, Mercedes, BMW, Honda ou même les marques les plus récalcitrantes sur l’électrique comme Toyota, tous les grands acteurs du marché planchent sur ces technologies SDV qui doivent, à moyen terme, permettre pour de bon d’arriver à de vraies voitures à conduite autonome grâce à la sophistication de leurs capteurs et à leur fonctionnement « connecté » à leur environnement et à des centrales de gestions de données dématérialisées. Avec tout ce que ça implique comme risques, que ce soit en matière de bugs aux conséquences catastrophiques mais aussi de failles comme celle qui vient de toucher les véhicules électriques connectés de Volkswagen, qui avaient d’ailleurs déjà été retardés sur le marché à cause de problèmes logiciels de sa filiale Cariad.
Reste que si les visiteurs du CES 2025 se sont massés autour du stand Honda, c'était sans doute moins pour admirer sa plateforme logicielle que pour observer les galbes tout à fait déroutants de l’étrange 0 Saloon exposée sur le stand, dont le style fait couler beaucoup d’encre. S’il reste un peu de créativité et d’originalité dans ce futur des voitures-logiciel, ça nous va. Surtout si elles peuvent aussi se montrer intéressantes à conduire, ce que nous promettent justement les dirigeants de Honda. Enfin, si on a encore le droit de les conduire dans ces univers où l’intelligence artificielle doit remplacer l’humain !
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