Matra Bagheera (1973 – 1980), un joli plan à trois, dès 8 000 €
Dans la Bagheera, le plaisir se prend à trois, installés côte à côte à l’avant, enveloppés d’une carrosserie style mini-supercar. Devenue bien rare, cette quinquagénaire originale, facile à vivre et peu onéreuse commence à attirer les amateurs.
Les collectionnables, c’est quoi ?
Ce sont des autos revêtant un intérêt particulier, donc méritant d’être préservées. Pas forcément anciennes, elles existent pourtant en quantité définie, soit parce que le constructeur en a décidé ainsi, soit parce que leur production est arrêtée. Ensuite, elles profitent de particularités qui les rendent spécialement désirables : une motorisation, un châssis, un design, ou un concept. Enfin, elles sont susceptibles de voir leur cote augmenter. Un argument supplémentaire pour les collectionner avant tout le monde !
Pourquoi la Matra Bagheera est-elle collectionnable ?
Fine, légère et inspirée de la compétition avec son moteur central arrière, la Matra Bagheera incarne à merveille la voiture de loisirs des années 70. Elle est rappelle aussi qu'en France, un petit constructeur, en l'occurrence Matra, pouvait prospérer en proposant des autos originales et conçues avec beaucoup d'intelligence. Les trois places avant en sont la preuve ! Longtemps oubliée, la Bagheera a été décimée par le manque de maintenance et la corrosion, de sorte que cette sportive unique en son genre est devenue extrêmement rare en bon état. Un morceau d'esprit français à préserver d'urgence !
On le sait peu, mais la première voiture de série, en après-guerre, à se doter d’un moteur central est française. C’est la Djet, de René-Bonnet, apparue en 1962, à mécanique dérivant de la… Renault Estafette.
Plutôt efficace, à une époque où l’Alpine prend son envol, elle attire le fabricant d’armes Matra qui, soucieux de se diversifier, rachète le petit constructeur. En 1964, l’entité Matra Automobiles est créée. Dès 1967, celle-ci présente la 530, une petite sportive originale, avec ses quatre places et son bloc central. Celui-ci est un V4 Ford, très compact mais poussif. Néanmoins, la 530 permet à Matra de s’installer dans le paysage, et de songer à la remplaçante de sa première auto spécifique.
Les études de celles-ci, codée M550, débutent en 1970, et le premier proto roule dès 1971. Un accord ayant été passé avec Simca, c’est ce dernier qui va fournir le 4-cylindres qui, comme sur la 530, s’installe au centre de la voiture, en position transversale. Côté concept, on innove : la future Matra recevra trois places de front, configuration jamais vue sur ce type de sportive.
Quant à la ligne, Jacques Nocher, accompagné de Jean Thropieux, choisit une voie plus consensuelle que celle de la 530, qu’il a également dessinée. Le développement ayant lieu sans gros soucis, la voiture est présentée en avril 1973, et elle emprunte son nom à la panthère du Livre de la Jungle : Bagheera. Son allure spectaculaire et moderne lui vaut des louanges, sa mécanique moins.
En effet, il s'agit du 1,3 l culbuté de la Simca 1100 Ti, qui certes préfigure les compactes sportives, avec ses 82 ch, mais cette cavalerie demeure un peu juste pour la Bagheera. Néanmoins, grâce à son excellent profilage (Cx de 0.33), la Matra file à plus de 180 km/h. De plus, comme sa structure monocoque revêtue d’une peau mêlant métal et RTM (Resine Transfer Moulding), principe inventé par Matra, reste légère (885 kg), elle accélère très convenablement. Pour bien tenir au sol, la Bagheera reprend le train avant de la 1100 et adopte à l’arrière des bras obliques, suspendus par des barres de torsion.
Dans l’habitacle, outre ses trois places, elle se distingue par son superbe tableau de bord dessiné par Antoine Volanis, plus tard auteur de la Rancho. Proposée à 24 750 F à son apparition en avril (24 150 € actuels selon l’Insee), la Matra est plus chère que la Fiat X1/9, mais accueille un passager supplémentaire ! Le lancement officiel a lieu en juillet, aux 24 Heures du Mans juste après que Pescarolo et Larrousse au volant d'une Matra MS670B ont battu Ferrari : le constructeur de Romorantin ne pouvait rêver mieux. A ce moment, la gamme Bagheera s’est déjà dédoublée en deux versions, la Type 1, de base, et la Type 2, dotée notamment des jantes alu et des sièges bicolores.
On pourrait croire que sa faible motorisation constitue un handicap pour la Bagheera, mais la crise du pétrole éclate en 1973, avec des prix à la pompe qui montent en flèche. Du coup, une auto sportive mais frugale prend tout son sens, et les ventes partent bien. En 1974, une variante chic, tout de blanc vêtue apparaît, la Courrèges, du nom du couturier qui s’est occupé de son apparence, mais c’est fin 1975 que la Bagheera bénéficie d’une évolution attendue : plus de puissance. En effet, sa nouvelle version S reçoit le 1,4 l de la 1308 GT, poussé à 90 ch, de quoi frôler les 190 km/h.
En 1976, la sportive triplace reçoit un restylage important : surfaces vitrées agrandies, feux arrière de 1307-1308, boucliers et tableau revus (vers moins d’originalité…). Mais la technique n’évolue guère, faute de budget, et le poids augmente, au détriment des performances. Embêtant quand une bombe nommée VW Golf GTI (110 ch) vient semer la terreur chez les sportives abordables ! Incapable de rivaliser, la française va glisser jusqu’à la retraite sans grande évolution.
En août 1977, la Courrèges est remplacée par la X, plus classique d’apparence, un an plus tard, l’habitacle reçoit quelques retouches (instrumentation surmontée d’une casquette), alors qu’une série limitée Jubilé fait un passage furtif en 1979. En 1980, la Bagheera cède la place à la Murena, après avoir été produite à 47 796 unités, ce qui demeure des plus honorables.
Combien ça coûte ?
La Bagheera la moins chère, la 1,3 l restylée, se déniche dès 8 000 € en bon état. La S, toujours en restylée, débute à 10 000 €, alors qu’il faut déjà compter 12 000 € pour une X, voire 14 000 € pour une Courrèges. Les premières séries sont plus onéreuses, réclamant un supplément de 2 000 €. Evidemment, majorez ces montants si vous dégottez un exemplaire en parfait état, ce qui compte bien plus que le kilométrage.
Quelle version choisir ?
La S de deuxième série présente le rapport prix/performances le plus intéressant de la gamme, tout en profitant déjà d’un équipement complet.
Les versions collector
Toute Bagheera en parfait état est un collector, a fortiori une de 1973, ou une Courrèges de première génération.
Que surveiller ?
L’énorme problème de la Bagheera, c’est son châssis qui pourrit allègrement sans que cela ne se voie. Un conseil, demandez à mettre sur un pont d’atelier l’exemplaire que vous convoitez avant de l’acheter. Examinez bien ensuite la carrosserie, notamment au niveau de la jonction montants de pare-brise (métalliques) et toit (en plastique). Dans l’habitacle, les garnitures sont fragiles sur les 1ères séries, moins sur les restylées. Mais les pièces spécifiques sont difficiles à dénicher.
Mécaniquement, c’est comme sur la Simca 1100 : costaud. Vu l’emplacement du moteur, il faut toutefois faire attention au circuit de refroidissement, sinon on risque de claquer un joint de culasse, tandis qu’on règlera régulièrement les culbuteurs, assez bruyants. Les synchros de boîtes, comme sur la Simca, se révèlent assez sensibles, mais on trouve les pièces.
Au volant
A bord de la Bagheera S restylée, on est surpris par l’ambiance plutôt cossue et douillette. Les revêtements sont chaleureux, les sièges confortables et le cockpit entièrement garni. On a même droit à des vitres électriques. Malgré la garde au toit un peu juste, on profite en sus d’une très bonne position de conduite.
Autre surprise, la bonne insonorisation du moteur. Souple, celui-ci sonne d’ailleurs plaisamment et ne rechigne absolument pas à prendre des tours, tout en autorisant des performances encore actuelles, sinon sportives. Evidemment, il n’a pas le caractère d’un petit Bialbero Alfa, mais il se débrouille très bien. La boîte, au demeurant moyennement plaisante à manier, ne compte pourtant que quatre rapports, relativement longs pour l’époque (30,42 km/h pour 1 000 tr/mn en 4è).
Avantage, cela permet de rouler à 130 km/h sur autoroute dans une ambiance phonique amplement supportable. Etonnant ! Comme de surcroît, la suspension filtre efficacement les aspérités, on profite d’un confort tout à fait inattendu. En somme, la Bagheera se veut plus GT que sportive, malgré un comportement routier remarquable d’équilibre et de précision, allié à une direction douce. Une petite auto seventies fortement agréable en usage courant, permettant, à un prix attractif, de rouler différent, le tout sans consommer exagérément : moins de 8 l/100 km.
L’alternative youngtimer
Toyota MR Mk II (1989 – 1999)
Pour vendre en France son petit coupé à moteur central, à partir de 1989, Toyota a jugé bon de le rebaptiser MR au lieu de MR2, homophonie scatologique oblige. Nous avons ici eu droit à la deuxième génération de cette japonaise originale, avec son toit amovible, et diablement séduisante grâce à son allure de petite Ferrari 348.
Derrière les deux passagers prend place un excellent 2,0 l 16 soupapes délivrant 160 ch, propulsant cette sportive des plus efficaces grâce à son excellente répartition des masses, à 220 km/h. Modifiée en 1992 (suspension), elle voit ensuite son prix enfler démesurément (234 700 F en 1996 – soit 52 200 € actuels, contre 163 950 F en 1990 – 41 600 €). Heureusement qu’elle est bien équipée, recevant de série l’ABS, la clim et sa sono. De plus, lors de son introduction en France, une spéculation sur les bons de commande a même eu lieu ! Mais elle quitte le marché dans l’indifférence générale en 1999. A partir de 9 000 €.
Matra Bagheera S (1977), la fiche technique
- Moteur : 4 cylindres en ligne, 1 442 cm3
- Alimentation : deux carburateurs double corps
- Suspension : bras superposés, barres de torsion, barre antiroulis (AV) ; bras obliques, barres de torsion (AR)
- Transmission : boîte 4 manuelle, roues arrière motrices
- Puissance : 90 ch à 5 800 tr/mn
- Couple : 120 Nm à 3 200 tr/mn
- Poids : 1 015 kg
- Vitesse maxi : 190 km/h (donnée constructeur)
- 0 à 100 km/h : Env. 12 s
Pour trouver des annonces de Matra, rendez-vous sur le site de La Centrale.
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