Route de nuit - L'automobile sexiste, c'était avant
Il aura fallu du temps avant que les constructeurs ne se rendent compte que les femmes sont des automobilistes comme les autres et des clients comme tout le monde. Il n'y a pas si longtemps, dans la pub auto, elles étaient, au mieux, des passagères, et au pire, de pauvres petites choses maladroites ou de simples faire-valoir. Florilège.
Tout le monde se souvient du tollé provoqué par une pub Audi en 1993 : "il a l'argent, il a le pouvoir, il aura la femme". Le spot ne se résumait pas à cette phrase, certes, mais Il était difficile de faire mieux en termes de misogynie automobile. En tout cas, ce petit film aura eu un mérite : celui de mettre fin à plusieurs décennies de sexisme publicitaire. C'est que, jusqu'à ces années 90, les femmes étaient un genre incompatible avec l'automobile. Pourtant, elles travaillaient déjà, réfléchissaient déjà, avaient leur permis de conduire, et, comme aujourd'hui, avaient moins d'accidents que ces messieurs lorsqu'elles conduisaient.
Femme au volant ...
Et pourtant, l'auto était un objet ultime de virilité. À ces messieurs la belle trajectoire, à ces dames, les créneaux loupés. Michèle Mouton était vice-championne du monde des rallyes et avait tapé de meilleurs chronos que des dizaines de garçons ? Un pur hasard, sans doute, car femme au volant, mort au tournant. Conscients, ou non, de cette vision machiste et bas du front, les publicitaires et leurs annonceurs se sont repus de cette manière d'appréhender le monde jusqu'à la fin du XXe siècle, jusqu’au tollé de la pub Audi. Leurs clients voulaient de la testostérone mécanique ? Ils leur en ont donné, durant des décennies.
Interdit aux filles
Pour conduire un 4x4, il faut être un baroudeur, un vrai, un poilu. Le Fortuner, une version fermée du Toyota Hilux est fait pour eux. Pas question de le confier à une fille puisque c'est écrit dans la pub : il est conçu pour les hommes. Jutta Kleinschmitt est une femme et elle a gagné le Dakar en 2001 devant des gars costauds et barbus ? Un hasard, encore.
La comparaison anatomique et stylistique
C'est un grand classique. Depuis la nuit des temps automobiles, l'auto (au féminin) est comparée aux courbes féminines. La belle carrosserie de l'une et des autres a produit quelques sommets de commentaires au goût discutable. Fiat, dans ces années 60 de cabriolets et de bikinis s'est engouffré dans la brèche et s'y est perdue.
Une auto assortie au maquillage
Pour attirer les filles et les transformer en clientes, il faut leur parler d'elles. Et pour ces messieurs du marketing Ford des années 60, à quoi peuvent bien rêver ces dames ? À leur rouge à lèvres et à leur maquillage, bien évidemment. Ce sont des Barbie qui laissent le soin à Ken de s'occuper des affaires du monde. Alors, on va leur concocter une Mustang toute rose, pour qu'elle soit assortie à leur parure. Logique. Honda a lui aussi tenté le coup en 2012, avec une série limitée de sa Fit (la Jazz chez nous), baptisée She's. Au menu : une peinture rose bonbon, des surpiqûres du même tonneau et un pare-brise anti-UV pour préserver la peau de ces dames. Un sommet de kitscherie girly goujate, et un bide intégral justifié.
La mysoginie, c'est fini
Mais tout ceci est du passé dépassé. Aujourd'hui, les constructeurs sont conscients que les femmes plébiscitent les SUV. Qu'elles sont souvent les prescriptrices, voir les premières conductrices de la voiture principale du ménage. Même si c'est, parfois, pour de mauvaises raisons (parce que ce sont-elles qui emmènent les enfants à l'école ou à leurs activités), la parité automobile a fini par s'imposer. Sauf dans le sport auto ou les filles sont aussi rares que les spectateurs cette dernière saison. Sauf à l'ACF (Automobile Club de France), ou les femmes ne sont toujours pas admises. Deux vénérables institutions qui s'adapteront, tôt ou tard. Sauf à ne plus remplir que les rôles de témoins d'un autre temps.
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