Voyage au bout de l'enfer
Engourdi par le froid et la solitude, Emerson n'a cependant pas tardé à organiser son exil. Suivant les recommandation de Frank Williams, il a choisi de faire ses classes en Formule Ford en se finançant avec l vente son affaire au Brésil et un petit budget Bardahl. Il doit impérativement convaincre ou se faire remarquer car il a tout juste assez d'argent pour tenir trois mois après l'achat d'une Merlyn. Pour préserver ses maigres économies mais aussi pour vaincre sa déprime, il a trouver un accord avec le préparateur Dennis Rowland qui lui assure l'entretien de son moteur en échange d'heures de travail dans son atelier. Quatre longues semaines plus tard, il part pour Zandvoort disputer enfin sa première course. Il n'a jamais piloté la Merlyn, ne connaît pas le circuit, mais réalise tout de même le second meilleur temps aux essais. En course, trois petits tours suffiront pour ruiner ses espoirs lorsque le moteur rendra l'âme. A Snetteron, ce sera pire encore. Une maladresse en déchargeant la Merlyn de la remorque brise la transmission. "Deux mois en travail pour rien. Ce jour là, j'ai pleuré, j'avais envie de rentrer au Brésil, d'oublier les journées glaciales, la petite chambre de Wimbledon et surtout la calamiteuse nourriture anglaise".
C'est Dennis Rowland qui va lui éviter le naufrage. Il ramène la Merlyn dans son atelier, répare la transmission et monte l'un de ses meilleurs moteur. Le samedi suivant, Emerson est non seulement au départ à Thruxton mais enlève sa première victoire, devant les Dave Walker, Tony Trimmer, Gerry Birrell et autre James Hunt, les ténors de la discipline. Fini, les heures de "vache enragée", Merlyn lui offre un statut de pilote d'usine tandis que dans les jours suivants, le soleil revient toutafait avec l'arrivée de la "tribut Fittipaldi". Wilson a choisi Londres comme étape à son voyage de noce et surtout la "Mama" les rejoint avec ses bons petits plats.
Après deux nouveaux succès et conscient de la sympathie qu'il suscite (un pilote brésilien était alors une curiosité inédite en Europe !), Emerson décide de brûler les étapes. En juin, il achète un châssis Lotus F3 avec la plus grande bienveillance de Mike Warner (le directeur de Lotus Components, l'unité compétition clients du Team Lotus) tandis que l'équipe de Jim Russell prend à sa charge l'achat des moteurs.
Cinquième pour ses débuts à Mallory Park, il se paye le luxe de devancer les Lotus officielles lors de sa seconde sortie à Brands Hatch avant de rafler huit victoires et le championnat Lombank. Fin 1969, il compte parmi les quatre "Grands", avec Ronnie Peterson, Tim Schenken et Reine Wisell, d'une saison de F3 qui fut d'un niveau qui ne sera jamais égalé. Lotus lui propose alors un contrat de pilote d'uine en F 3 pour 1970.Emerson qui sait que ses trois principaux rivaux seront en F2 l'année suivante, ne veut pas perdre de temps et se dit prêt à signer avec Lotus... mais en F2. Un arrangement est vite trouvé avec le montage d'une équipe semi-officielle confiée à Jim Russell et financée par plusieurs firmes brésiliennes dont la filiale de Ford. Après une campagne victorieuse en Formule Ford pendant l'intersaison au Brésil, il débute au printemps 1970 en Formule 2 avec l'élite, treize mois seulement après son arrivée anonyme sur le sol anglais. Ce n'est qu'une étape.
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