Épisode précédent :

Nissan GT-R 2012 au quotidien : jour 1, la découverte du monstre


Après la présentation générale de la voiture hier, on va commencer doucement avec un petit essai urbain direction Caradisiac. Enfin doucement... Je vais être honnête, la première idée stupide qui m'est venue à l'esprit, c'est utiliser le launch control au feu rouge avec le limiteur de vitesse réglé à 50 km/h. Pas de risque d'excès de vitesse de cette façon, peut-être par contre une amende de 45 € pour régime moteur excessif (article R318-3 du Code de la Route), donc don't try this at home, laissez ça à des professionnels éclairés qui les passent en note de frais. Malheureusement, la GT-R gâche la fête en n'ayant pas de limiteur de vitesse, seulement un régulateur. Dommage.

Mais ce n'est pas pour autant qu'on peut faire une croix sur les sensations en ville. Elles commencent d'ailleurs dès le parking souterrain par des sueurs froides. Vous voyez, une GT-R au réveil, c'est un peu caractériel, le temps que sa multitude d'organes mécaniques baignant dans l'huile parvienne à température. La boîte rechigne à monter les rapports et le moteur donne quelques à-coups, rien de bien méchant, mais la plus grosse émotion intervient au moment d'emprunter la rampe en colimaçon menant à la sortie. Soudain, un bruit de frottement métallique provenant de la roue arrière intérieure résonne contre les murs gris du parking. Je pousse un petit cri aigu ridicule et des images de jante forgée chanfreinée par le trottoir jusqu'au pneu me traversent l'esprit. Vous savez, les fameuses Rays en 20 pouces affichées à 6 831,55 € dans le catalogue des accessoires Nissan. Mais une fois arrivé à la surface et après une sortie fiévreuse de la voiture pour constater les dégâts les genoux tremblants, rien, pas une rayure, pas même un éclat. Et c'est là que je dégaine ce qui deviendra dans les jours qui viennent mon confident et l'épaule sur laquelle je me reposerai pour être rassuré : le manuel de l'utilisateur, gros comme le bottin des Yvelines. Il existe un chapitre entier intitulé « DES BRUITS APPARAISSENT PENDANT LA CONDUITE » (oui, en majuscules), avec une énumération de tous les sons étranges et inquiétants que peut émettre une Nissan GT-R. Et il y en a un paquet. Tiens, voilà, j'ai trouvé.

Différentiel à glissement limité mécanique : Si, après un arrêt, que le volant est tourné amplement et que la température est basse, le pneu intérieur risque de glisser et du bruit et des vibrations peuvent être perçus. Ce phénomène se produit car la viscosité de l'huile de différentiel augmente (l'huile s'épaissit) et la force de fonctionnement du différentiel à glissement limité est de plus en plus importante. 

Soupir de soulagement. Bien, reprenons. Pour cet exercice urbain, je laisse la boîte en mode automatique et le réglage sur normal pour garder un minimum de répondant. Après avoir enquillé quelques rues pavées, il est par contre préférable de passer les suspensions Bilstein Damptronic en confort si on ne veut pas perdre sa langue en la mordant par inadvertance, la souplesse ainsi gagnée permet de digérer la plupart des nids de poule. Une fois tous ses fluides à température, la GT-R se transforme alors en citadine confortable, avec un système audio Bose tout à fait convaincant. En fait, le seul défaut, et il est de taille, ce sont les angles morts massifs tant à droite qu'à gauche, suffisamment grands pour y cacher un porte-avions, à cause des toutes petites vitres de custode. Et si vous essayez de pencher la tête par la vitre latérale pour jeter un œil, vous avez de grandes chances de régulièrement vous cogner sur le montant très incliné du pare-brise. À gauche, pas de salut, il faudra vous y faire. À droite, avancer le siège passager au maximum permet par contre d'obtenir une meurtrière acceptable.


Comme la Caterham R300 Superlight, la combinaison Nissan GT-R/Vibrant Red est un véritable piège à garçons. Messieurs, si vous voulez attirer l'attention de la gent féminine, le meilleur outil automobile reste jusque-là la Mia électrique. Les scootéristes se dévissent dangereusement le cou et j'attire régulièrement les coups d’œil insistants et le pompage frénétique d'accélérateur des propriétaires de Honda Civic EG6 tuning JDM. Bonjour à vous aussi, échelons inférieurs de la chaîne alimentaire. Par contre, je ne sais pas si ça vient du modèle ou de la couleur pétante, mais il y a pas mal d'automobilistes ou de motards qui se montrent agressifs. Ne comptez pas trop qu'on vous laisse vous insérer tranquillement et vous avez intérêt à démarrer dans la même micro-seconde que le feu passe au vert, par exemple.

Nissan GT-R 2012 au quotidien : jour 2, Godzilla envahit la ville
Nissan GT-R 2012 au quotidien : jour 2, Godzilla envahit la ville
Nissan GT-R 2012 au quotidien : jour 2, Godzilla envahit la ville

Bien sûr, pas besoin de faire parler la puissance en ville, tout se fait au couple, et avec 632 Nm disponibles dès 3 200 tr/min, la GT-R est plutôt très bien pourvue à ce rayon. Dans ces conditions, la boîte en mode automatique change ses rapports très tôt et on se retrouve à cruiser tranquillement en sixième à 50 km/h, le V6 ronronnant comme un chaton.


Après près d'une heure de bouchon, me voilà arrivé à destination sans encombre. Les freins grincent bien un peu quand on appuie légèrement sur la pédale à basse vitesse, mais c'est assez commun sur les voitures de sport, et c'est même bien pire sur une BMW M3 E92 par exemple. Mais ce n'est pas pourtant que le test urbain se termine. Vous voyez, il y a Charybde et Scylla mais, probablement pour ne pas effrayer les lecteurs les plus sensibles, l'Odyssée d'Homère a oublié de mentionner le parking de Caradisiac, dont l'entrée est constituée de deux portes automatiques successives, la première devant être franchie obligatoirement de biais avec de très nombreux passants peu enclins à faire un détour, suivie d'une rampe au fort pourcentage aboutissant enfin à la zone de stationnement et ses places obscures, basse de plafond et parsemée de très nombreux et épais poteaux. La lame avant frotte généreusement (mais ce n'est visiblement pas la première fois), le rayon de braquage de 12 mètres n'est pas extraordinaire, ni la visibilité, mais ce qui me gène surtout, ce sont les nouveaux bruits. Un vrai orchestre, cette GT-R, mais le concert qu'elle donne est plutôt effrayant, surtout quand on est comme moi habitué à rouler en ancienne. Ce grelottement-là, comme si on secouait un sac rempli de canettes en alu, il vient vraiment de la transmission ? Vite, le manuel ! Voyons, voyons... Ah !

Boîte de vitesses : Comme une boîte de vitesses manuelle, la boîte de vitesses à double embrayage utilise un engrenage à axe parallèle qui entraîne un bruit de choc d'engrenage. Par conséquent, le bruit de la boîte de vitesses à double embrayage est plus fort que celui d'une boîte de vitesses automatique conventionnelle de type convertisseur de couple en raison de ce qui suit.

_ Un jeu d'engrènement plus important est appliqué entre les engrenages afin d'assurer une lubrification régulière de la surface des dents

_ Le véhicule est équipé d'un système de lubrification à carter afin d'obtenir une alimentation d'huile régulière en cas de conduite avec une charge élevée

_ Il est également équipé d'un volant moteur ultraléger pour améliorer la réponse du moteur par rapport à l'actionnement de la pédale d'accélérateur.

_ Il est possible que vous entendiez un bruit de ferraille lors du passage des vitesses.

_ Le jeu entre les pignons est réglé avec précision afin d'obtenir une rotation sans à-coups des pignons et une lubrification continue de la surface dentée dans des conditions de conduite à charge élevée. Toutefois, vous risquez de percevoir des cliquetis.

« Un bruit de ferraille », oui, c'est très bien décrit, on y est, c'est tout à fait ça. Il est maintenant temps de laisser refroidir le monstre et d'aller mériter mon salaire. Après une nouvelle journée harassante de travail à regarder des vidéos sur YouTube, le moment est venu d'extraire la fusée rouge du parking. Et là, problème. Gros problème. Au moment d'attaquer la rampe de sortie, une plaque métallique forme une marche minuscule qui n'est pas gênante pour descendre, mais contre laquelle la lame avant vient buter bruyamment (son que l'on entend très bien dans la vidéo) pour monter à cause d'un angle d'attaque extrêmement réduit de 9,8°. Une seule solution : appeler mon compère Alexandre Bataille pour qu'il m'aide à sortir tout en marche arrière. Un vrai cauchemar, surtout quand on y ajoute les à-coups de la mécanique froide déjà cités plus haut.


Heureusement, le retour au bercail se fait ensuite sans encombre sur un filet de gaz et ma tension redescend enfin à des niveaux acceptables.

Nissan GT-R 2012 au quotidien : jour 2, Godzilla envahit la ville

Bon, ça suffit pour la ville. Sans surprise, ce n'est pas le territoire favori de la GT-R, surtout pendant les manœuvres, mais elle s'affranchit tout de même de cette épreuve avec les honneurs pour une voiture hautes performances, se montrant même confortable dans le trafic. Changement de lieu et d'ambiance demain, on va se dégourdir un peu les cylindres dans un environnement protégé, si vous voyez ce que je veux dire.


Épisode suivant :

Nissan GT-R 2012 au quotidien : jour 2, Godzilla envahit la ville

Nissan GT-R 2012 au quotidien : jour 3, à l'assaut du circuit

Nissan GT-R 2012 au quotidien : jour 4, visite chez DM Performance, pour ceux qui en veulent toujours plus

Nissan GT-R 2012 au quotidien : jour 5, direction la mer


Twitter : @PierreDdeG