Avant, l'unique offre au niveau mécanique au moment de choisir un nouveau véhicule était de se décider entre essence et diesel et un jeu de clés (ainsi qu'un marteau parfois) suffisait pour les réparer. Mais ça, c'était avant. Ces dernières années, le contenu des baies moteur s'est considérablement complexifié, il faut désormais un doctorat d'électronicien avant d'ouvrir le capot et des termes obscurs comme flex-fuel, downsizing, électrique avec ou sans prolongateur d'autonomie et hybride, ont fait leur entrée dans le discours rodé des commerciaux des concessions.

Économique ou écologique, vraie innovation ou poudre aux yeux, pour le déterminer il est désormais indispensable d'avoir un guide servant de phare dans ce brouillard technologique. Et ça tombe bien, puisque nous avons à Caradisiac le professeur François Chapus qui parle couramment le jargon et qui se charge d'expliquer aux béotiens comment ça marche, mais surtout, au-delà du discours commercial, si ça fonctionne réellement en dehors des laboratoires de test.

Cette semaine, après le dernier épisode qui mettait en scène les hybrides diesels Peugeot 3008 et Citroën DS5 Hybrid4, François s'attaque maintenant à la Chevrolet Volt.

Doté de deux moteurs électriques, la Chevrolet Volt est un grande compacte quatre places à cinq portes qui permet de parcourir à l’électricité pure entre 40 et 80 kilomètres, selon le profil de la route, le style de conduite et la température. Afin de prolonger l’autonomie quand l’énergie de la batterie est épuisée, la Volt passe en mode d’autonomie augmentée grâce au range extender. C’est un petit moteur thermique à essence qui joue le rôle de générateur (producteur de courant), permettant essentiellement d’alimenter les moteurs électriques, voire de transmettre lui aussi son couple aux roues dans certains cas. Il porte l’autonomie jusqu’à environ 560 kilomètres avec un plein d’essence, jusqu’à ce que la voiture puisse être branchée et rechargée ou qu’elle puisse faire le plein de carburant. Contrairement aux voitures purement électriques à l’autonomie et aux performances limitées, la Volt offre une polyvalence acceptable et peut donc constituer contraintes notables l’unique voiture d’un foyer.


Comment ça marche??

La Chevrolet Volt est classée comme une voiture électrique à prolongateur d’autonomie (E-REV, pour Extended Range Electric Vehicle), alors que depuis octobre 2010, on sait qu’il s’agit bien d’une hybride avec des batteries rechargeable (PH EV, pour plug-in hybrid electric vehicle). Avant cette date, dès l’officialisation du projet en 2007, Chevrolet nous cachait le vrai fonctionnement de la Volt, tout comme Opel pour l’Ampera...


 What is it : François vous explique la Chevrolet Volt

Le système de propulsion électrique Voltec de la Volt et de l’Ampera comprend une batterie lithium-ion de 198 kg en forme de T disposée sous le plancher d’une capacité totale de 16 kWh (5,2 kWh de capacité totale et 4,4 kWh de capacité utile pour la Toyota Prius Plug-in), un boîtier de gestion électronique du groupe propulseur électrique, un moteur électrique de traction de 111 kW/150 ch (moteur principal), un moteur électrique de 54 kW/72 ch, qui sert également de générateur en mode d’autonomie augmentée, et un générateur thermique (moteur à essence 1,4 litre à 16 soupapes de 63 kW/86 ch à 4?800 tr/mn et 130 Nm), partiellement (sic?!) à cycle Atkinson-Miller afin de gagner en rendement énergétique selon des ingénieurs Opel interrogés. Le moteur de traction offre 370 Nm de couple instantané. Le rôle principal du moteur/générateur électrique est de fournir de l’électricité quand le moteur essence prolongateur d’autonomie est en route.


Le rôle majeur du générateur thermique (moteur 1,4 litre) est de fournir une puissance mécanique qui puisse être convertie en électricité par le générateur chaque fois que la batterie a atteint son niveau minimum de charge afin de la maintenir aux environs de 30 % de sa charge complète si la récupération d’énergie au freinage n’y suffit pas. La batterie ne se charge complètement qu'en mode plug in, sur une prise de courant classique. La puissance fournie par le groupe propulseur électrique est transmise aux roues avant par un différentiel et un système à train planétaire épicycloïdal (comprenant une couronne, un planétaire, porte satellites et les pignons-satellites) faisant office de boîte de vitesses à un seul rapport, avec variation en continue si nécessaire. Comme l’efficacité d’un moteur électrique diminue toujours au fur et à mesure qu’il s’approche de sa vitesse de rotation maximale en raison des phénomènes d'auto-induction, le train épicycloïdal permet d’améliorer le rendement global en réduisant la vitesse de rotation maximum du moteur de traction.


 What is it : François vous explique la Chevrolet Volt

Cette configuration sophistiquée utilise trois embrayages qui peuvent se fermer électriquement au besoin. L’un relie le moteur électrique/générateur à la couronne extérieure du train épicycloïdal, un autre solidarise la couronne et le carter de boîte et un troisième connecte le générateur thermique (moteur 1.4 litre) au moteur/générateur pour la conduite en autonomie augmentée. Les performances routières sont quasiment identiques, que le groupe propulseur électrique soit alimenté par la seule batterie ou par l’énergie fournie en mode à autonomie augmentée.



Les complexes 4 modes de fonctionnement de cette transmission à engrenages, deux en conduite sur batterie (mode véhicule électrique simple moteur et mode véhicule électrique bi-moteur) et deux autres pour la conduite en autonomie augmentée (dont un fait de la Volt une vraie hybride à répartition de puissance) sont partiellement expliqués à partir d’un document GM en page 2 de cet article.

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Fonctionnement ultra-secret

Le moteur électrique, le moteur thermique et le second moteur électrique faisant au besoin office de générateur sont donc tous les trois couplés à un engrenage épicycloïdal qui transmet le couple aux roues avant. Ils peuvent fonctionner épisodiquement ensemble ou séparément, le plus souvent par deux. C’est selon trois paramètres principalement, la sollicitation à l’accélérateur, la vitesse à laquelle on roule et le niveau de charge de la batterie. Ce qui serait impossible avec une boîte de vitesse conventionnelle, incapable de gérer et mixer trois sources de mouvements. C’est exactement le schéma d’une Toyota Prius -rechargeable ou pas-, sauf qu’ici le système est un peu plus compliqué avec par exemple l’ajout d’un troisième embrayage et encore plus ingénieux, afin de bénéficier d’un rapport de démultiplication variable qui améliore le rendement. Avec son train épicycloïdal qui autorise des modes de fonctionnement différents, la Volt est donc bien une hybride série/parallèle (full hybrid) comme les Toyota/Lexus, et non pas une électrique à prolongateur d’autonomie comme voulait le faire croire GM. Elle est toutefois une hybride série (le moteur thermique alimente uniquement le générateur, l’unique force motrice étant électrique) en mode électrique et démultiplication fixe, en électrique à haute rotations des moteurs avec démultiplication variable, ou encore moteurs électriques et thermique en fonctionnement à basse et moyenne vitesses.

Dans certaines circonstances, une fois la batterie déchargée à 70 % tout en roulant au-dessus de 100 km/h, la Volt n’est plus seulement entraînée mécaniquement par ses moteurs électriques, mais par le moteur thermique secondé par le petit moteur électrique, alors que le 1.4 était censé servir uniquement de générateur pour alimenter le petit moteur électrique/alternateur d’après les explications rabâchées par GM depuis 2008. Elle devient donc dans ce cas une véritable hybride à répartition de puissance, le contraire d'une hybride série. Pourquoi avoir caché cette possibilité qui offre l’avantage d’un meilleur rendement grâce à un cheminement court de la force motrice, et qui réduit donc la consommation de 10 à 15 % sur autoroute par rapport à la traction purement électrique?? Certains avancent qu’il s’agissait pour le constructeur de brouiller les pistes face à ses concurrents (Fisker, Volvo et quelques autres) dans le domaine des voitures électriques à prolongateur d'autonomie, ainsi que de d’attendre que les brevets déposés par GM soient dûment enregistrés.


Comment faire le plein??

Pour la batterie d’accumulateurs de la Volt d’une capacité de stockage de 16 kWh, un câble de recharge de six mètres 230V est fourni en série, et rangé sous le plancher du coffre, mais pas très commode sans le moindre enrouleur. On peut charger totalement la batterie en moins de quatre heures sur une prise secteur domestique 230V/16A. Pour plus de possibilités en fonction de divers réseaux où l’intensité disponible pourrait être limitée, le câble de recharge peut être réglé sur quatre intensités?: 16A, 13A, 10A ou 6A. La Volt peut aussi être programmée pour une charge différée, par exemple à l’heure où le compteur passe dans une tranche tarifaire plus intéressante.

 What is it : François vous explique la Chevrolet Volt

Il est également possible de gérer et de contrôler la Volt à distance grâce au site MyVolt.com, ou par l’intermédiaire d’une application exclusive sur smartphone, Chevrolet Mobile App utilisant OnStar Mylink. Là encore, on peut charger en calculant sa recharge en fonction de la période où le courant est le meilleur marché et/ou pour que la batterie soit chargée à l’heure de départ prévue. La batterie entièrement chargée donne une autonomie variant selon nous de 35 à 85 km . Ce delta important dépend du relief, de la météo et des diverses sollicitations de confort (clim, etc).

Pour le réservoir d’essence de 35 litres, précisons juste que du SP 95 suffit amplement.


Est-ce écologique ?

Les émissions de CO2 sont de seulement 27 g/km, ce qui est excellent, mais selon un mode de calcul spécifique applicable uniquement aux hybrides rechargeables, qui ne correspond pas à grand chose dans la réalité. Bon, des émissions zéro sur une soixantaine de kilomètres, rien à redire, c’est presque parfait, surtout si les sources de production de l’électricité sont propres. Au delà, moteur thermique en fonctionnement, le bilan rejoint celui d’une petite familiale équipée d’un moteur à essence d’environ 100 chevaux, avec des rejets de CO2 aux alentours de 130 g/km. Pas mauvais, mais les meilleures compactes à essence à performances et agrément comparables descendent maintenant à moins de 120 grammes. Pour les polluants comme les Nox, la Volt en recrache très peu comparativement aux diesels. Quant au retraitement en fin de vie du véhicule, nous n’en savons pas encore grand chose. Pour les batteries, il est prévue leur utilisation future en collaboration avec ABB Group, notamment dans l’amélioration du rendement d’installations de production d’énergie éolienne et solaire.


Est-ce économique ?

A 43 500 € (sans la navigation et le système audio Bose à 1 500 €), la Volt est très chère. Certes, on retranche les 5 000 € de bonus et le client profite d’un équipement presque complet incluant notamment la sellerie cuir et de larges garanties. Celle de 8 ans ou 160.000 kilomètres pour la motorisation Voltec et la batterie lithium-ion est une des plus étendues pour un véhicule hybride. A cela s’ajoute la garantie limitée à 3 ans/60.000 kilomètres sur toute la voiture, et 5 ans/160.000 kilomètres sur le moteur à essence. Voilà qui réduira les mauvaises surprises sur le moyen terme, sachant par ailleurs que les coûts d’entretien annoncés sont sensiblement inférieurs à ceux d’une compacte Diesel. Mais quand même, on reste à un prix d’achat presque doublé par rapport à la Chevrolet Cruze 5 portes de milieu de gamme essence ou Diesel. Il va donc falloir faire de sérieuses économies à la pompe ou à la prise pour rentabiliser l’achat d’une Volt...

Foin de la consommation de 1,2 l/100 annoncée, un cycle d’homologation concocté spécialement pour les hybrides rechargeable encore plus irréaliste que celui nous connaissons pour les autos à moteurs thermique. La consommation homologuée est le fruit de celle mesurée en mode thermique sur 25 kilomètres (sur le classique cycle Nedc de 11 kilomètres) et l’autre batterie pleine (donc 0,00 l/100 km pour les modèles hybrides capable d’atteindre en mode électrique à la fois 25 kilomètres et la vitesse de 120 km/h, la pointe maximale atteinte lors du cycle extra-urbain). La moyenne de ces deux consommations est pondérée par l’autonomie en mode pur électrique calculée selon la norme ECE R101. Ce calcul complètement arbitraire permet à un véhicule d’une autonomie de pile 25 km en électrique d’avoir une consommation mixte normée divisée strictement par deux par rapport à celle normée du thermique. C’est exactement le cas de la Prius rechargeable dont l’autonomie de 25 km en mode 100% électrique permet à Toyota d’afficher une consommation en cycle mixte de 2,1l/100 km (49 gr CO2/km). Plus la capacité de la batterie est grande, plus la consommation annoncée sera minorée. Avec 60 kilomètres d’autonomie moyenne en électrique, la consommation mixte normée est ainsi divisée par 3,4 pour la Volt. D’où la moyenne de 1,2 l/100 annoncée par Chevrolet (près de 2 l/100 aux Etats Unis aux normes plus réalistes), tandis que la consommation mixte normée en thermique avoisinerait 4,2 l/100.


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Pour notre part, nous ne sommes jamais sorti de la fourchette 6/8 litres lors des différents essais de la Volt et de l’Ampera à partir du moment où le moteur thermique est mis à contribution. A priori, le rendement obtenu du couple moteur thermique/générateur n’est pas extraordinaire, mais si on tient compte des 1 720 kilos à mouvoir (deux à quatre quintaux de plus que la Cruze dont elle reprend en partie la plateforme), il est effectivement pas mal du tout. Tablons sur 7 l/100 réels en moyenne pour une conduite raisonnable. Avec son réservoir de 35 litres, cela donne une autonomie de 520 kilomètres.



Si, on ajoute l’utilisation complète d’une batterie chargée en usage normal et conditions météo pas trop défavorables, on abouti aussi à une autonomie totale de 560 km. Dans ce cas, le coût de la consommation globale sera de 54 € (à raison de 1,50 € le litre d’essence et de 0,13 € le kWh), soit un peu moins de 10 € au cent kilomètres. Un coût équivalent à une compacte Diesel si on prend une consommation réelle de 7 l/100 et le gazole à 1,40 € le litre. Par rapport à un tel véhicule moins cher d’au moins 10 000 €, il faudra donc que le prix du gazole grimpe sacrément pour que l’usage de la Volt puisse devenir financièrement intéressant, ou bien rouler le plus souvent possible en électrique.

A raison de ces 0,13 € le kWh (en option « base » à EDF, hors prix de l’abonnement), la recharge des 70 % manquant de la batterie, donc le plein complet d’électricité revient à environ 1,4 € qui permet en moyenne de faire 60 kilomètres. Ce qui représente moins de 2,4 €/100 km, soit 3 fois moins que pour une berline compacte Diesel très sobre ou une Toyota Prius non rechargeable. Voilà qui devient plus attrayant pour des trajets d’environ de 60 km par jour (ou le double avec une recharge intermédiaire), mais cette hypothèse ne concerne qu’une infime partie des automobilistes et dont bien peu sont prets à investir près de 40 000 € dans une voiture. Et il faut un jour ou l’autre mettre à contribution le moteur thermique car la Volt possède un mode de maintenance qui oblige au bout de six semaines à sa mise en route afin d’assurer une bonne lubrification des organes mécaniques. De même, pour éviter que le carburant ne se dégrade, elle va consommer le réservoir au bout d’un an sans faire le plein. A moins, bien sûr, de rajouter de l’essence. Pour clore le sujet, il est tentant de cerner l’usage fait par les Américains qui ont acheté une Volt, pour permettre à ceux qui hésitent de faire quelques projections réalistes calculettes en mains : la moyenne entre deux pleins d’essence est de 1600 kilomètres, ce qui signifie que les utilisateurs font près de 1 100 kilomètres en électrique, et sur la base de 60 km par charge complète réalisent 18 recharges entre deux ravitaillement en essence.


J’achète, j’achète pas ?

 What is it : François vous explique la Chevrolet Volt

La Volt coûte et coûtera toujours plus cher qu’un véhicule 100% électrique ou qu’un modèle hybride classique. Malgré ce lourd handicap, ses quatre places seulement et quelques défauts (du simple tissu maintenu par quatre élastiques destiné à recouvrir le coffre ou la capacité de ce dernier limité à 310 litres, en passant par une réponse à la pédale de frein tardive en ville ou le bas de caisse avant étant très bas qui frotte souvent), je trouve cette Volt tentante. Plaisante à conduire, en silence une bonne partie du temps, et avec les accélérations et les reprises d’un petit V6 essence si nécessaire et réellement utilisable au quotidien. J’apprécie également l’aspect technologiquement avancé, ce qui lui a sans doute valu son titre de Voiture de l’Année 2012 en Europe.

Petit bémol sur ce point pour le classique moteur thermique 1.4 qui sert de générateur, alors que pour fournir du courant électrique, on peut espérer d’autres types de moteurs à rendement nettement plus élevé. Mais finalement, comme de toute façon je ne fais pas 60 kilomètres par jour régulièrement, je n’achète pas.