2. Mercedes G580 électrique & G63 AMG (2024) - Sur la route : vertiges de l'amour
Puisque la plus grosse nouveauté de ce « nouveau » Mercedes Classe G concerne sa version électrique, commençons donc par cette inédite déclinaison à brancher du vénérable tout-terrain allemand. Elle intègre sous son châssis à échelle une grosse batterie de 116 kWh de capacité nette à la chimie très proche de celle de la limousine EQS (avec une disposition différente et une enveloppe en fibre de carbone pour la protéger). Beau comme un camion de la même façon que le G500 (à la calandre près), ce G580 demande presque d’escalader à bord (merci aux marchepieds montés en série d’ailleurs). Surprise, la pression sur le bouton de démarrage dévoile une petite séquence sonore qui mime un moteur thermique au réveil. Sous le capot, pourtant, point de mécanique à pétrole mais plutôt quatre moteurs électriques répartis à chacune des roues, comme sur la SLS Electric Drive de 2012 (mais avec une technologie en fait très différente).
L’absence de bruit mécanique, combinée à l’opulence de l’intérieur et au léger phénomène de pompage perceptible à allure tranquille, vous rappellerait presque de vieilles balades en Rolls-Royce Phantom. Très confortable malgré l’absence de suspension pneumatique, il dévoile sans surprise des performances de haut niveau quand on commence à utiliser l’accélérateur. Pas étonnant avec 587 chevaux et 1 164 Nm de couple cumulé (0 à 100 km/ en 4,7 secondes, vitesse maximale de 180 km/h). On fait aussi vite connaissance avec la masse de la bête, n'avouant pas moins de 3 085 kg sur la balance. Consommation relevée ? 30 kWh/100 sur la route avec une conduite moyennement économe avant de tester le mode Sport et d’adopter un rythme bien plus énergivore encore. Mais d’autres journalistes rapportent 24 kWh/100 à rythme paisible sur un parcours extra-urbain. Il ne sera sans doute pas possible de descendre très en-dessous de ce niveau-là ce qui augure d’une autonomie maximale légèrement au-dessus des 450 kilomètres en conduite mixte. Côté recharge, les 200 kW en puissance maximale (architecture à 400 volts) permettent de repasser de 10 à 80% en 32 minutes en courant continu d’après Mercedes.
Cette consommation dépasse les 40 kWh/100 si vous décidez de conduire le G580 comme une voiture de sport. Ça paraît un peu incongru dit comme ça, sachant qu’on sent tout de suite de gros mouvements de caisse et les pneus s’écraser sur leur flanc en criant dans les virages abordés de façon enjouée. Mais l’architecture des quatre moteurs permet de réaliser de vraies prouesses dynamiques, dans le même temps, avec un pachyderme qui resserre puissamment sa trajectoire vers l’intérieur de la courbe grâce au pilotage individuel des électromoteurs et une fonction « torque vectoring » presque infinie. Encore mieux qu’un bon blocage de différentiel ! Sans aller jusqu’à aborder le G580 comme un vrai SUV ultra-sportif, on se prend à se demander ce qu’il se passerait si les metteurs au point d’AMG posaient leurs mains sur un engin pareil. En ligne droite à pleine charge, on sent parfois quelques légères remontées de couple dans le volant et d’après les ingénieurs de Mercedes consultés sur place, ce fut la chose la plus délicate à mettre au point dans le cadre de son développement : s’assurer que les moteurs tournent exactement à la même vitesse lors des fortes sollicitations en ligne droite. Sur la route, la conduite du G580 « EQ Technology » ne fait pas offense à son positionnement de voiture de luxe. Et il ne rend pas le « G » ennuyeux. Ce système magique des quatre moteurs électriques indépendants va probablement vite faire son chemin sur les autres autos de la gamme Mercedes, même s’il induit une masse supérieure par rapport à une configuration bimoteur…
Et en tout-terrain ? Là encore, l’architecture très particulière du groupe motopropulseur du G580 fait merveille. Rien que pour en mettre plein la vue, déjà, le fameux « G-Turn » fait fureur. Placez le sélecteur de transmission en mode neutre, actionnez le mode « boîte courte » sur l’un des trois boutons de la console centrale (ceux qui servent plutôt à verrouiller les différentiels mécaniques sur le Classe G thermique depuis 1990), puis passez la marche avant et appuyez sur le bouton du « G-turn ». Maintenez ensuite enfoncée l’une des deux palettes du volant (la gauche pour aller vers la gauche et la droite pour aller à droite, logique), garder ce volant bien droit, accélérez et…vous voilà projetés dans un 720 degrés en quatre secondes, le véhicule tournant sur lui-même en activant ses roues dans le sens contraire de chaque côté.
Autre fonction qui peut cette fois trouver une réelle utilité en tout-terrain, le « G-Steer », également activable via l’un des trois boutons de la console centrale en boîte courte, permet de faire pivoter le véhicule dans des espaces très réduits en bloquant l’une des roues arrière. Notez que ces deux fonctions ne doivent s’activer que sur des surfaces glissantes comme la terre d’après Mercedes. Le G-Turn ferait paraît-il fumer les pneus sur du bitume et avec du recul, on aurait donc très envie d’essayer.
Une fois ce mode « boîte courte » activé en tout cas, le G580 semble quasiment invincible en tout-terrain et escalade à peu près tout ce qu’on lui met sous les roues. Le pilotage individuel des roues permet d’obtenir une facilité d’évolution hors normes en tout-terrain et on n’a quasiment plus rien à faire dans les montées les plus raides au-dessus des rochers où il suffit de laisser le « rampage » faire tout seul en choisissant sa vitesse de façon totalement stabilisée. La protection en carbone de la batterie sous le plancher peut cogner sur les cailloux les plus gros (malgré la garde au sol de 250 mm), mais cela n’effraie pas les spécialistes de Mercedes nous assurant qu’elle est « faite pour ça ». Capable de s’immerger dans 850 mm d’eau et d’aller vraiment très loin sur tous les terrains, ce G580 fait au moins aussi bien que les autres G hors des sentiers battus et respecte l’image de « meilleur franchisseur de la planète » qu’on colle souvent au Classe G. A noter que d’après certains moniteurs consultés sur place, le G450 diesel de 367 chevaux pourrait malgré tout conserver des aptitudes légèrement meilleures dans certaines situations. Pour des conducteurs expérimentés en tout-terrain, précisent-ils.
Le grand méchant G63
Passons maintenant au volant de la version la plus « méchante » du catalogue du Classe G, l’incontournable G63 qu’on voit souvent dans les films d’action à côté de faux gangsters albanais. Il conserve une allure aussi patibulaire qu’impressionnante (surtout quand on le voit passer sur la route !) et son V8 bi-turbo de 4,0 litres développant 585 chevaux et 850 Nm de couple. Comme les autres variantes thermiques de la gamme (le G500 essence de 449 chevaux et le G450 diesel de 367 chevaux non commercialisé chez nous pour le moment), il gagne un circuit électrique à 48 volts. Le G63 s’offre aussi en option l’inédite suspension Active Ride Control déjà utilisé par le roadster SL, qui remplace les barres anti-roulis par un circuit hydraulique reliant les quatre amortisseurs deux à deux en croix, censé à la fois améliorer la tenue de caisse et le confort.
On commence sur la route avec un G63 équipé du pack AMG Performance à 12 000€, ajoutant à l’Active Ride Control le « Drivers Package’s » et des optimisations pour la conduite routière sportive (réduisant le 0 à 100 km/h en 4,3 secondes au lieu de 4,4 via un système launch control et augmentant la vitesse de pointe à 240 km/h au lieu de 220). Avec ses échappements latéraux qui grognent près des vitres, démarrer un tel colosse vous donnerait presque des frissons tellement il en impose. Plus fermement tenu que le G580 électrique (et plus « léger » avec ses 2 640 kg à vide), il glougloute fièrement sur la route et demeure aussi confortable que luxueux même si son amortissement n’atteint pas la douceur d’un Range Rover ou d’un Bentley Bentayga. Il donne aussi tout naturellement envie de le pousser en passant le mode le plus extrême sur son petit sélecteur au volant. Cette fameuse suspension Active Ride fait-elle des miracles en conduite sportive ?
Non. Certes, il faut relativiser un peu en se disant qu’adopter un tel rythme au volant d’un Mercedes Classe G reste en soi assez miraculeux. Mais ces suspensions n’empêchent pas le G63 de souffrir de mouvements de caisse nuisant beaucoup à la précision de conduite dans les portions les plus sinueuses et la boîte de vitesses automatique se montre très restrictive dans son paramétrage en mode manuel (il faut anticiper les passages supérieurs pour ne pas se retrouver bloquer au rupteur pendant de longs dixièmes de seconde et redescendre beaucoup en régime avant de pouvoir rétrograder). L’ESP, jamais totalement déconnectable en-dehors des modes tout-terrains, témoigne d’ailleurs de la moindre sportivité du G63 quand on le compare avec les meilleurs SUV dynamiques du marché (Porsche Cayenne en tête ou GLE AMG pour rester chez Mercedes). Certes, ces derniers ne composent pas avec un châssis séparé et l’Allemand se montre malgré tout amusant et même carrément touchant quand on le malmène. Cravacher un G63 c’est comme passer une soirée avec votre idole, ne pas être déçu mais découvrir qu’il fait parfois des blagues un peu gênantes. On lui pardonne parce qu’on rigole bien (et que même augmentée artificiellement, la sonorité du V8 reste cool).
Et le tout terrain ? Alors là, attention. Passé au volant d’un G63 équipé du pack Offroad au lieu de l’AMG Performance (à 12 000€ aussi), il utilise lui aussi l’Active Ride Control mais sacrifie un tout petit peu d’efficacité routière pour s’équiper d’amortisseurs plus gros et de modes plus poussés pour la conduite en tout-terrain. On se retrouve face à une piste de terre destinée aux essais des protos du Dakar, avec comme consigne de ne pas hésiter à rouler à fond. Le G63 saute, s’écrase sur ses suspensions, cogne contre les bosses er rebondit joyeusement. Mais à l’intérieur, on ne perçoit quasiment rien tant le confort règne dans ce cadre si hostile ! Avec en point d’orgue, un petit saut à 90 km/h qui ne perturbe en rien les suspensions de ce gros bébé de 2,6 tonnes lorsqu’il retombe sur la planète Terre. L’expérience nous rappelle un peu cette scène de James Bond « Mourir peut attendre » où les méchants fracassent des Land Rover Defender dans une course-poursuite à fond en tout-terrain. Décidément, les méchants vont très bien avec ce genre de voitures.
On n’aura pas eu le temps de faire du vrai franchissement avec ce G63, dont la plus grosse limite serait paraît-il la présence des échappements latéraux plus exposés dans les passages où l’angle ventral compte. Notons que certains exemplaires utilisés en tout-terrain portaient de jolies stigmates de rayures et autres projections de pierres sur leurs peintures de luxe. Que c’est beau, un Classe G réellement utilisé pour ses capacités !
Terminons enfin en évoquant le G500 formant l’entrée de gamme thermique en France avec son six cylindres en ligne de 3,0 litres de 449 chevaux (toujours à hybridation légère). On l’a un peu snobé en sachant que le précédent G500 ne représentait que 20% des ventes en France à côté des 80% du G63 haut de gamme, mais il se trouve que la jolie sonorité de son six cylindres et ses bonnes performances routières en font tout de même une version digne d’interêt face aux muscles du G63 qui coûte quand même 32 000€ de plus (avec le même malus, hélas).
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